Blogs, service presse et petit éditeur

Je sais que je vais me faire détester. D’ailleurs, j’ai longtemps hésité avant d’écrire cet article, et si je le fait sur mon blog personnel plutôt que sur celui de Flammèche, ce n’est pas sans raisons. Le sujet est tabou et franchement sensible.

Un petit éditeur (ou dans mon cas, un micro éditeur, encore plus petit que petit…) a besoin des blogs. Quand on n’a pas de réseau de distribution, quand on manque d’expérience pratique et qu’on est fragile financièrement parce qu’on vient de se lancer, les chroniques des blogs littéraires sont un sacré plus car elles font fonctionner le bouche à oreille. Quand je propose des SP et que les retours arrivent, cela a clairement un impact sur les ventes.

A côté de ça, je reçois régulièrement des demandes spontanées de SP. Dans la mesure du possible, j’essaye de répondre favorablement, mais à chaque fois, cela me met mal à l’aise.

Premièrement, parce que j’ai clairement spécifié sur le site que pour l’instant, je préférais contacter moi-même les blogs et sites que je connaissais pour cibler au mieux les envois ; avec des annonces périodiques sur les réseaux sociaux pour des SP « libres ». Alors peut-être que je n’ai pas été assez claire, mais cela me donne l’impression que les gens ne se sont pas vraiment renseignés sur la maison. Pour tout dire, j’ai reçu les premières demandes de SP à peine un mois après l’ouverture de la maison, alors qu’aucun contrat n’avait encore été signé. Donc, en gros, il y en a qui se fichent pas mal de savoir ce qui va être publié, qui se fichent de savoir si l’histoire va leur plaire ou non, tant qu’ils peuvent avoir des exemplaires gratuits…

(Exemplaires qui sont ensuite revendus sur Ebay ou PriceMinister lorsqu’il s’agit de papier – le grand sport national, tous les éditeurs le savent bien – ou pire, partagés sur des plateformes de lectures en ligne. Sisi. J’ai bien halluciné le jour où je suis tombée sur un compte Calaméo répertoriant entre autre exemplaires du Chat Noir et de l’Homme Sans Nom, des ouvrages de Rebelle sur lesquels figuraient encore les repères de coupe. Heureusement, le compte a vite été supprimé.)

L’autre raison pour laquelle ces demandes me mettent mal à l’aise, c’est parce qu’elles prouvent qu’il y a un public intéressé par les publications (dans le cas où un titre précis est demandé, ou quand la personne précise ses goûts), mais pas suffisamment pour acheter. Et ça, ça, vous n’imaginez pas à quel point ça peut être frustrant ! Pour l’une des parution, j’ai reçu plus de demandes de SP qu’il n’y a eu de ventes…

Bref. Je comprends bien l’intérêt des blogueurs pour les SP et je ne les blâme pas. Après tout, je suis moi-même blogueuse, je sais que la communauté est faite de gros lecteurs qui ne roulent pas sur l’or. Et que 20€ pour un livre, quand il y a cinq nouveautés et plus qui nous font de l’œil, c’est juste pas possible.

Mais quand il s’agit de petits éditeurs, personnellement, j’ai pour principe de toujours acheter les ouvrages. Ça les aides à continuer, et en prime, si je n’ai pas apprécié le récit, je me sens moins coupable de le faire savoir (ou de ne pas faire de chronique du tout, alors qu’un SP représente un engagement moral).

Je ne dis pas qu’il faut faire comme moi. Je souhaitais juste exprimer ce qu’on peut ressentir en tant que petit éditeur quand on a des SP non sollicité (et je parle uniquement dans mon cas, pas au nom de tous les petits, soyons bien clairs !) Par contre, recevoir le lien d’une chronique quand on n’a pas sollicité le blogueur, c’est toujours très sympa, et personnellement, ça me donne envie de noter soigneusement le lien du blog pour les prochains SP.

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Le petit éditeur est un animal fragile, soutenez-le avant qu’il ne disparaisse !

3 réflexions sur “Blogs, service presse et petit éditeur

  1. Je ne savais pas que ça se revendait sur E bay et je trouve ça assez choquant.
    Perso je participe aux grosses opérations (Match price minister ) mais autrement je ne demande pas pour mon blog. C’est normal de recevoir le livre pour un journaliste qui fait un article dans un magazine ou autre, ou qui va interviewer un auteur. Mais en dehors de la profession, je trouve ça légitime seulement occasionnellement mais pas à tout bout de champ. ( Bon je pense que beaucoup de blogueurs sont réglos de ce côté là !) Et puis je préfère payer et faire un coup de pub pour une petite maison d’édition qui fait un joli travail (je pense à Critic par exemple) que pour une grosse industrie du livre qui de toute façon trouvera lecteurs !

  2. Ha ha, moi aussi, j’ai reçu des demandes de SP presque un an avant qu’on publie le premier ebook ! Et, bien sûr, quand tu les recontactes à ce moment-là pour dire « toujours intéressée ? », c’est soit silence radio, soit « non, c’est bon, j’ai à présent ma dose de SP » (donc, effectivement, ce n’était pas *ta* maison ou *tes* auteurs qui les intéressaient, mais juste les premiers livres gratuits sur lesquels ils pouvaient mettre la main…). Et, oui, c’est vrai, les blogueurs qui acceptent volontiers tes SP tous les mois, mais estiment qu’il n’est pas question de dépenser un euro (c’est le prix d’une nouvelle en numérique) pour lire le début d’une série dont tu proposes la suite gratuitement, ça fait grincer des dents…
    Cela dit, maintenant que je fais ça depuis plus d’un an, voici mes observations : 1) les chroniques sur les blogs ont absolument zéro impact sur les ventes, dans un sens ou dans l’autre, et 2) n’empêche qu’au début, peut-être qu’on n’a pas le choix que de faire parler de nous le plus possible. Là, je manque encore de recul pour l’affirmer, mais peut-être que c’est un travail de longue haleine. La première année, les gens n’achèteront pas. La deuxième non plus. Mais peut-être qu’après trois, quatre ans à entendre parler de toi et à lire des chroniques positives de tes livres, il se laisseront finalement tenter. Alors, même si je pense profondément que les personnes soi-disant intéressées devraient faire le petit effort d’acheter certaines de nos parutions, je musèle mes convictions pour l’instant. On ne peut pas modeler son propre comportement sur celui des personnes qui ont tort, tout simplement…

  3. Je pense que les frustrations sont des deux côtés… et que cela fait aussi partie du jeu 🙂 On peut toujours éduquer les deux parties. Ceci dit, oui, on peut aussi réaliser de très chouettes rencontres.

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