Hé ! Mademoiselle !

madmoiselleHé ! Mademoiselle !
par Yatuu

Éditeur : Delcourt
ISBN : 978-2-756-05233-5
Prix public : 14.95 €

Présentation éditeur :

« Hé ! Mademoiselle ! T’es charmante. Tu m’donne ton 06 ? »

Version sort ou trash, tout y passe. La drague de rue : un phénomène de société dont les femmes se passeraient bien ! Cet album vous dira tout – avec humour – sur ceux qui la pratiquent… et celles qui la subissent, l’esquissent, voir y répliquent !

Mon avis :

En voyant ce nouvel album de Yatuu en librairie, je n’ai pas pu résister. En effet, j’avais déjà eu l’occasion d’apprécier l’humour et le trait de crayon de cette artiste à travers Moi, 20 ans, diplômée, motivée… exploitée ! et Génération mal-logée.

Yatuu revient donc avec un nouvel album traitant d’un sujet sur lequel mon côté féministe est assez sensible : le harcèlement de rue. Vous savez ce truc qui fait qu’on hésite à mettre une jupe ou un sort par crainte d’une réflexion (parce que c’est bien connu, si on met une jupe en été, c’est pas parce qu’il fait chaud, mais parce qu’on veut se faire b… bref !)

A travers ses planches, Yatuu nous présente de nombreuses situation de harcèlement de rue dans lesquelles beaucoup de femmes pourront se reconnaitre. Cela va des propositions obscènes (avec insultes à la clé en cas de refus) à  la main mises « innocemment » aux fesses dans le métro.

Ce que j’ai particulièrement apprécié, ce sont toutes les stratégies pleines d’humour et parfois de dérision, développées par les différentes héroïnes pour repousser tous ces relous.

Par contre, j’ai regretté que l’artiste s’attarde autant sur les relous « kaïra/bourrés/etc. » et assez peu sur les relous « ordinaires ». Parce que bon, malheureusement, les réflexions injurieuses et les invitations obscènes peuvent aussi venir d’hommes cultivés et propre sur eux… Et c’est pas toujours beaucoup plus subtil…

En bref

Un album à mettre entre toutes les mains, aussi bien féminines que masculines – car comme le dit l’artiste à la fin, l’apprentissage du respect promet d’être longue et difficile.

Addict

addictAddict
de Jeanne Ryan

Éditeur : Robert Laffont – Collection R
ISBN : 978-2-2211-3410-8
Prix public : 16.90 €

Présentation de l’éditeur :

Un jeu sans règle ni pitié. Qu’êtes-vous prêt à perdre pour gagner ? Vee, dix-sept ans, est sous l’étroite surveillance de ses parents depuis qu’ils l’ont retrouvée quelques mois auparavant endormie au volant de la voiture familiale, dans le garage, moteur allumé. Elle a beau plaider l’accident et non la tentative de suicide, elle n’a pas le droit de sortir sauf pour jouer son rôle de maquilleuse-costumière dans la production théâtrale du lycée. Un soir, elle décide de relever l’un des défis proposés par ADDICT, jeu trash de télé réalité diffusé sur le Net qui promet des cadeaux somptueux contre des paris toujours plus pervers. Mais voilà qu’elle est sélectionnée, à sa grande surprise. Pour se sentir enfin vivante, Vee va alors accepter des défis de plus en plus malsains… Jusqu’à quelle dose d’adrénaline pourra-t-elle survivre ?

Mon avis :

Addict nous plonge dans l’univers de Vee, une jeune fille de 17 ans passionnée de théâtre et de mode. Notre héroïne est présentée comme une personne intelligente, un peu timide et dévouée à ses amis. Un jour elle décide de relever l’un des défis d’Addict, le nouveau jeu qui fait sensation auprès des adolescents. Plusieurs raisons l’y poussent : la sensation d’être toujours dans l’ombre, le désir d’attirer l’attention du crétin arrogant dont elle pense être amoureuse… Se prouver qu’elle peut le faire, tout simplement. Et puis, finalement, ce n’était pas si terrible… alors pourquoi ne pas continuer ? D’autant plus que les lots proposés par le jeu sont franchement alléchants. Mais voilà, au fur et à mesure les défis deviennent de plus en plus pénibles.

Même si au premier abord Vee m’a paru attachante, j’ai eu envie de lui coller des claques lorsqu’elle acceptait de nouveaux défis. Et pourtant, elle a beau se comporter comme une véritable idiote, je ne parvenais pas à la détester. Il y a quelque chose dans ce personnage et dans sa manière d’agir qui m’intriguait, me fascinait. Ce n’est que ce matin, deux jours après avoir posé le livre que j’ai réalisé pourquoi : Vee est un personnage terriblement réaliste et crédible dans ses réactions. Quand j’étais ado, j’ai trop bien connu ce désir de faire des bêtises, poussée par le groupe, avec l’espoir « d’exister ».

C’est facile de se dire, parce qu’on est devenu adulte, ou parce qu’on est un lecteur bien au chaud dans notre fauteuil « Non mais franchement, elle est vraiment trop idiote, moi j’aurai pas fait ça ! ». Il n’empêche qu’on a tous été adolescent un jour, et que Vee, ça aurait pu être nous.

Plus saisissant encore, le jeu en lui-même, Addict. Quand la « télé-réalité » a commencé à se développer à partir de 2001, devenant de plus en plus trash pour satisfaire un public toujours plus exigent, cela a amené une question : jusqu’où pourrions nous aller ? Je me souviens que nous en avions longuement débattue en cours de Culture G il y a deux ans, et nous en étions arrivés à la conclusion que finalement, tant que les personnes sont consentantes, peut-on les juger ? Addict aura eu le mérite de m’apporter une vision nouvelle, car si Vee est en effet consentante, elle est aussi victime. Victime de la perversité du public, victime de l’argent facile. Et victime du je-m’en-foutisme général, car tout le monde est convaincu que tout est scénarisé, sous contrôle.

La fin m’aura laissée dubitative. Je trouve intéressant que tout ne soit pas si facile, mais le revirement final m’a vraiment paru too-much. De même, en arrivant aux dernières pages, je me suis demandé à quoi rimait l’introduction, finalement ? A rien, on aurait tout aussi bien pu s’en passer.

Autre point que j’ai trouvé dommage : le fait que les parents sont totalement relégués au second plan. L’histoire de l’accident de Vee a une place importante dans le roman, et cela a entrainé un problème de confiance entre elle et ses parents. Du coup, je m’attendais à une confrontation, au moins sur la fin, mais c’est tout juste si l’auteur en parle sur un paragraphe. Et pour dire quoi ? « Notre fille a fait la plus grosse bêtise de sa vie, elle a faillit y rester, mais on a vu qu’elle n’était pas suicidaire, alors on décide de lui refaire confiance. » Bien sûûûûûr ! Et la marmotte…

Enfin, dernier commentaire sur la traduction. Le livre s’intitule Nerve en anglais, traduit par Addict en VF. J’imagine donc qu’en VO, le jeu doit  également s’appeler Nerve. Alors autant je trouve que le titre VF s’adapte relativement bien au livre, autant, appeler un jeu qui « joue sur les nerfs » des participants Addict, je ne saisis pas bien le rapport. Dommage.

En résumé :

Addict est un roman qui repose sur la psychologie et le réalisme. A l’exception de quelques petits détails, tout semble terriblement crédible. Le pari est donc remporté avec brio, car bien que les dérives du jeu puissent nous paraitre aberrantes, il est tout à fait possible qu’un jour la réalité prenne le pas sur la fiction. A méditer…

Génération mal logée ! – Tome 2

Génération mal logée– Tome 2
Par Yatuu

Prix public : 13€90
ISBN : 978-2-356-48432-1

Présentation éditeur :

Videl a bien du souci à se faire… elle qui a eu tellement de mal à trouver une colocation, la voilà seule à devoir tout assumer ! On ne peut pas dire qu’elle roule sur l’or, comparé aux étudiants qu’elle cottoie à la faculté. Son cousin qui l’hébergeait est parti, et la menace d’une expulsion se profile… Comment va-t-elle s’en sortir ? Va-t-elle pouvoir poursuivre ses études à la Borbonne ?

Mon avis :

Dans ce second volet, nous retrouvons Videl, qui doit cette fois affronter le regard de ses camarades richissimes de la Borbonne. Parallèlement, ses colocataires la lâchent et elle ne sait plus comment s’en sortir…

Pour rappel, j’ai eu l’occasion de découvrir en juin dernier le premier tome de Génération mal logée ! qui avait sur me séduit par son côté instructif et son humour parfois très noir. Celui-ci est à l’inverse plus narratif qu’autre chose et on n’apprend pas grand-chose, si ce n’est qu’il existe de nombreux logements inutilisés et qu’avoir un salaire ne suffit pas toujours pour obtenir un appartement décent. Vous me direz, c’est déjà bien à savoir et à dénoncer. Oui, certes.

A côté de ça, j’ai trouvé l’humour plutôt décevant. Il est essentiellement basé sur des expressions exagérées, avec les personnages qui font d’énormes grimaces, sautillant partout en agitant les bras dans tous les sens. Pour certaines situations, l’effet est réussit. Mais trop de grimaces tue les grimaces ; quand l’humour n’est plus basé que sur ça, arrive un moment où on n’a plus envie de rire. C’est dommage, car le potentiel est là, clairement.

En résumé, ce second tome ne correspond pas à ce à quoi je m’attendais au départ, c’est à dire quelque chose qui soit dans le même ton que le tome 1. Cela m’aura légèrement déçue, mais je me suis néanmoins laissée entrainer par l’histoire et par ses personnages attachants – ou détestable, selon le cas !

Génération mal logée

Génération mal logée – Tome 1
Par Yatuu

Prix public : 13€90
ISBN : 978-2-356-48394-2

Présentation éditeur :

JF sérieuse et motivée cherche appt à louer :
Propre, bien élevée et indépendante, je n’exige aucune garantie ! Sauf une ou deux choses : un studio si possible sans cafards ni champignons, des fenêtres avec carreaux, sans fuite d’eau, et pouvoir m’étendre sans toucher les 4 murs (solides et sans trous de préférence) …
Je suis disponible de suite !

Mon avis :

Videl est une jeune fille qui vient d’être acceptée dans l’école de ses rêves à Paris. Etant provinciale, il lui faudra trouver un appartement pour se loger. « Fingers in the nose » pense-t-elle – après tout, être acceptée à la Borbonne, c’était forcément le plus dur.

Commence alors pour elle une longue galère, d’agence en proprios, de visites en désillusions.

Dans cette BD au graphisme qui rappellerait les caricatures que l’on peut voir dans les journaux, on assiste à a peu près toutes les galères qu’un jeune étudiant inexpérimenté peut rencontrer. L’auteur parvient à nous faire rire de situations pourtant dramatique en dénonçant les abus des propriétaires, des agences, mais aussi parfois des locataires, comme cette famille qui, en gagnant 4000€ par mois, continue à occuper un logement social.

Cette BD a aussi pour intérêt qu’en plus de dénoncer, elle met en garde, en expliquant ce que les propriétaires et agences peuvent vous demander sans que cela soit légal.

En conclusion, cette BD aura été pour moi un coup de cœur, parce qu’elle est drôle, fraiche, utile, et parce que je me serais personellement reconnue dans certaines situations. A découvrir !

Le bleu est une couleur chaude

 Le bleu est une couleur chaude
par Julie Maroh
Editions Glénat

Prix public : 15,50€
ISBN : 978-2-7234-6783-4

Quatrième de couverture :

Mon ange de bleu
Bleu du ciel
bleu des rivières
Source de vie

La vie de Clémentine bascule le jour où elle rencontre Emma, une jeune fille aux cheveux bleus, qui lui fait découvrir toutes les facettes du désir et lui permettra d’affronter le regard des autres. Un récit tendre et sensible.

Mon avis :

J’ai lu cette BD il y a plusieurs mois déjà, mais c’est avec plaisir que je l’ai redécouverte après que l’on me l’ait offerte. Elle raconte l’histoire de Clémentine à travers les journaux intimes qu’elle a laissés derrière elle après sa mort.

Clémentine, c’est une jeune adolescente bercée d’illusions sur l’amour, et qui ne comprend pas pourquoi cette jeune fille aux cheveux bleus l’obsède autant. Plus qu’une romance, cette bande dessinée retranscrit ce qu’on peut ressentir à la découverte de son homosexualité, les doutes, les peurs. Le mensonge et le rejet lorsque tout est découvert. Heureusement, Emma est là pour l’aider grâce à leur amour réciproque, mais même au sein de leur couple rien n’est simple.

L’histoire de ces deux jeunes filles, puis de ces deux jeunes femmes aura su me toucher jusqu’aux larmes. Le graphisme, qui peut paraitre assez brouillon de prime abord, sait mettre en avant les émotions des personnages pour nous plonger au mieux dans l’histoire. Les touches de bleu dans les souvenirs gris ne sont pas laissées au hasard, de même que cette bulle p124 qui éclaire à elle seule toute la pièce. Cette BD mérite largement son Prix du Public 2011 du festival d’Angoulême ainsi que tous les éloges que les journaux ont pu faire dessus.

Les tribulations d’une caissière

Les tribulations d’une caissière
par Anna Sam
Editions Hachette, collection Le livre de Poche

Prix public : 5,50 €
ISBN : 978-2-2531-2755-0

Quatrième de couverture :

Elle s’appelle Anna, elle a vingt-huit ans, un diplôme universitaire de littérature et huit ans d’expérience derrière une caisse de supermarché.
Un métier peu propice aux échanges, ponctué de gestes automatiques… Anna aurait pu se sentir devenir un robot si elle n’avait eu l’idée de raconter son travail, jour après jour. Elle vous a vu passer à la caisse. Vous avez été des clients faciles ou des emmerdeurs, riches ou pauvres, complexés de la consommation ou frimeurs. Vous l’avez confondue avec une plante verte ou vous lui avez dit bonjour, vous avez trépigné à l’ouverture du magasin ou avez été l’habitué nonchalant des fermetures. Anna, vous l’avez draguée, méprisée, insultée. Il ne se passe rien dans la vie d’une caissière ? Maintenant, prenez votre chariot et suivez Anna jusqu’à sa caisse.

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Mon avis :

Tout commence par un blog. Et à la lecture, cela se sent, chaque chapitre racontant une anecdote isolée ou parlant d’un sujet différent, comme ce serait le cas des billets de blogs. J’ai eu l’occasion de lire des critiques acerbes, certains lecteurs reprochant à l’ouvrage le manque d’analyse. Je ne partage absolument pas ce point de vue car pour moi, Les tribulations d’une caissière doit être pris comme un journal, non comme un essai.

Grâce à ce livre, nous pouvons plonger dans le quotidien d’une caissière. On en voit tous les jours, parfois on se retrouve même de l’autre côté du tapis pour essayer de payer son loyer. Dans les deux cas on ne peut rester insensible et indifférent à la lecture.

Je n’ai personnellement que trois petites semaines d’expérience, mais je me suis quand même reconnue dans un certain nombre de propos. Et oui, les clients sont toujours les même et on occupes toutes nos pensées comme on peut – moi c’était la façon dont les gens enfonçaient leur carte bleue dans le lecteur, mais ça s’arrête là. Certaines anecdotes et histoires me font dresser les cheveux sur la tête. Comment peut-on à ce point manquer de respect que ce soit envers la caissière, les autres clients ou même envers soi-même ?

Bref, cet ouvrage se laisse lire, il permet de passer un bon moment, mais peut aussi faire réfléchir. Aucun lecteur ne pourra plus regarder les caissières de la même manière.

Note :

Casse-toi !

Casse-toi ! de Jean-Marie Périer

Éditions Pocket
Quatrième de couverture : On croit l’homosexualité entrée dans les mœurs. Acceptée. Au pire, tolérée. Mais rien n’est plus faux. Dans nombre de foyers, un coming-out inattendu mène encore au drame. On croit sortir du placard, mais on se retrouve à la rue. […] Une situation inadmissible que dénonce Jean-Marie Périer dans ce livre coup-de-poing. À ces jeunes bannis, privés d’un toit, d’une famille, il donne la parole. […]
Mon avis : Le 17 mai dernier était journée internationale de lutte contre l’homophobie. Une bonne occasion de rappeler que l’homophobie est présente partout, même là où on ne l’attend pas. Mais une journée, ce n’est jamais suffisant.
Dans Casse-toi ! l’auteur a donné la parole à neuf jeunes homosexuels à peine sortis de l’adolescence. Contrairement à ce à quoi on pourrait s’attendre au premier abord, le but de ce recueil de témoignages n’est pas de lutter contre l’homophobie. Ce serait d’ailleurs peine perdue : quel homophobe irait acheter ce livre, qui le lirait ? L’ouvrage s’adresse donc à des personnes déjà touchées, qui peuvent se sentir concernées. Le but est clair : sensibiliser ce public à la cause du Refuge, l’association qui a permis à ces jeunes à la rue de trouver temporairement un toit. Car comme on peut s’y attendre, beaucoup sont dans le besoin, et peu de moyens sont à disposition.
Ces témoignages sont particulièrement touchants, certains m’ont même fait pleurer tant ils sont révoltants. Comme le disent les premières lignes de la quatrième de couverture, on croit à tors que l’homosexualité n’est plus un problème pour une majorité de gens, que bientôt on pourra enfin voir le mariage et l’adoption autorisés… Mais le chemin est encore long. Certains de ces jeunes ont dû quitter le domicile familial sous les menaces de mort. Les autres ont fugué, épuisé par le harcèlement moral qu’ils subissaient de la part de leurs propres parents.

Il y a à mes yeux une chose importante à retenir de toutes ces histoires. Dans beaucoup de cas, les parents ont rejeté leur propre enfant parce qu’ils voyaient s’effondrer tout espoir de famille : un beau mariage et des bébés. Je suis convaincue que si le mariage et l’adoption étaient autorisés aujourd’hui, dans quelques années on verrait nombre de jeunes homosexuels jetés à la rue diminuer considérablement. Le refus de droits aussi simples et naturels pour les hétérosexuels est purement discriminatoire et contribue fortement au rejet. Car on ne peut nier que dans l’esprit de bon nombre de gens, pour réussir sa vie, il faut un bon travail certes, mais avant toute chose, l’essentiel, c’est la famille : un mariage grandiose, une belle et grande maison achetée à deux et des enfants qui pourront jouer dans le jardin parfaitement entretenu…